Voyage à Méroé, au Fleuve Blanc, au delà de Fâzoql dans le midi du royaume de Sennâr, à Syouah et dans cinq autres oasis; fait dans les années 1819, 1820 ,1821 et 1822 par M. Frédéric Caillaud de Nantes.
Paris, Imprimerie Royale, 1823-1827. 1826 4 vol. in-8° (223 x 136 mm) et 2 vol. d'atlas in-plano non rognés ni reliés (540 x 375 mm) de: I. [2] ff. (faux titre, titre) ; XV (privilège, préface), 429 pp (dont table), planches; II. [2] ff. (faux titre, titre), 442 pp (dont table), 4 planches coloriées ; III. [2] ff. (faux titre, titre), 429 pp (dont table), 4 planches coloriées et 2 planches en noir ; IV. [2] ff. (faux titre, titre), 416 pp (dont table) ; 1 planche en noir, soit un total de 15 planches hors texte numérotées dont 12 aquarellées et gommées; et de: Atlas I. [2] ff. (faux titre, titre en 2 exemplaires), [15] ff. (dédicace, explication des planches), 75 planches numérotées de 1 à 75; Atlas II. [10] ff. (faux titre, titre, explication des planches) ; 74 planches numérotées de 1 à 75 (la grande carte de la Nubie sur double-page est numérotée 54 et 55°, soit un total de 149 planches. Ex-dono signé de lauteur « à Mme Libaudière » à lencre noire sur le faux-titre du vol. 1 ( volumes de texte à toutes marges non coupés, serpentes conservées, taches, rousseurs, traces de mouillures dans les marges, déchirures restaurées à langle supérieur de 2 planches ). Volumes de texte conservés dans leur brochage éditeur avec couvertures imprimées, titre sur la couverture et au dos avec encadrements, planches des atlas non reliés rangées dans des cartonnages recouverts des couvertures imprimées, avec lacets de maintien. (taches, défauts dusage, petits manques.)
Rare exemplaire à toutes marges de l'édition originale de cet ouvrage monumental sur les antiquités égyptiennes de la Haute Égypte dû à Frédéric Cailliaud, alias Mourad Effendi, naturaliste, explorateur et pionnier de l'égyptologie. Fréderic Cailliaud (1787-1869) est originaire de Nantes ou il fut le voisin de Jean-Jacques Audubon (1785-1851) considéré comme le premier ornithologue du Nouveau Monde. En 1809, attiré par les minéraux, les collections et l'Orient, il part pour Paris où il exerce le métier de bijoutier et suit les cours de minéralogie du Muséum. En 1811, il voyage en Italie. En août 1814, la chute de Napoléon le force à fuir vers la Grèce, Istambul et l'Egypte. A Alexandrie, Cailliaud séjourne chez le chevalier B. Drovetti, le consule de France. Collectionneur, ce dernier repère les compétences du jeune homme pour les minéraux et le travail des pierres et il le prends à son service. En mars 1816, la remontée du Nil éblouit Frédéric Cailliaud, saisi de voir tant de richesses archéologiques. Déjà ses notes sur la vie rurale en Egypte témoignent de ses dons d'observation, ses descriptions sont précises et détaillées. Le souverain Mehemet Ali Pacha le nomme minéralogiste officiel par un firman du 7 août 1816 et l'envoie rechercher les mines d'émeraude de Zaharah, oubliées depuis vingt siècles. Sillonnant le désert entre Nil et mer Rouge en novembre 1816, il retrouve des restes de bâtiments et, à proximité d'un filon de schistes micacés, des souterrains abandonnés. Il s'y enfonce seul et découvre sa première émeraude. Deux livres d'émeraude seront extraites de ces mines abandonnées. En février 1817, il remonte le Nil vers la haute Egypte. En mai, à Syout (Assioût), il assiste à l'arrivée d'une immense caravane de « seize mille têtes de bétail » en provenance du Darfour. En novembre 1817, il redécouvre une ville minière abandonnée, elle aussi, depuis vingt siècles : Sekket (Bandar-el-Kebir) et, peu après, le site du port antique de Bérénice. En 1818, il explore le premier les oasis de Kharga (Khargeh) à l'ouest de Thèbes. Il a ainsi parcouru 7 500 kilomètres à dos de chameau, en felouque, et il comprend l'arabe lorsqu'il regagne Paris, en février 1815 avec ses collections, descriptions et dessins. Il y acquiert l'admiration et la protection du grand géographe-égyptologue Edme François Jomard (1777-1862). Frédéric Cailliaud repart ainsi à titre officiel, avec un financement. Jomard souhaite l'établissement d'une carte d'Egypte avec une localisation précise des villes et des monuments antiques. On lui adjoint un spécialiste des relevés astronomiques : l'aspirant de marine Pierre-Constant Letorzec. De novembre 1815 à février 1820, ils effectuent une méharée de 1 800 kilomètres à l'ouest du Nil via le Fayoum, les oasis de Siouah où les constructions sont faites de sable et de sel. Ils poursuivent par les oasis de Bahariya (El Haïz), Farafra (Qasr el-Farâfra), Dâkhla (El Qasr Dakhel), Teneydeh (Teneida) et Kharga, avant de regagner Assiout ayant repéré des ruines de temples, d'églises coptes, de sources chaudes, des dépôts fossilifères ... De retour au Caire, Cailliaud et Letorzec sont désignés pour accompagner une grande mission, dirigée par Ismaël Pacha, fils de Mehemet Ali. Ils y voient une occasion de gagner le grand sud. Ils achètent une felouque et quittent le Caire, le 22 avril 1820. A l'escale de Thèbes, Cailliaud reprend ses fouilles. Le 3 octobre 1820, nouveau départ : Philae, Absimbolli (Abou Simbel), Semma, Sesce Ils inventorient les temples et étudient la faune, des termites aux hippopotames et girafes, et retrouvant le fameux scarabée d'Egypte. La flore aride suscite aussi leur intérêt : thalas (Acacia raddiana), nerprun ou jujubier (Ziziphus spinachristi), palmier-doum (Hyphaene thebaïca), roustonnier (Calotropis procera), héglys (Balanites aegyptiaca). Le 27 mai, l'expédition atteint le confluent du Nil Bleu avec le Nil Blanc dit « Ras (pointe) el Gartoum » qui deviendra Khartoum, future capitale du Soudan. Remontant la vallée du Nil Bleu en pleine saison des pluies, l'expédition est décimée par la maladie : dysenterie, malaria, fièvre jaune, gangrène. Continuant vers le sud, ils atteignent les basses collines dAbyssinie ; la végétation change avec les bambous (Oxytenanthera abyssinicaï ; ils trouvent enfin quelques sables aurifères mais les mines d'or du Fazoql ne sont pas l'eldorado espéré. Ils ont atteint le point le plus méridional de lexpédition : Singué, entre celle de Djibouti et d'Addis Abeba. L'expédition, décimée par la maladie et l'hostilité des indigènes, ne peut poursuivre. Letorzec est très affaibli par le paludisme et les deux Nantais prennent, le Il févier 1822, le chemin du retour en barque ou à dos de dromadaire. Près de Méroé, ils croisent l'explorateur lorientais Linant de Bellefonds, en mission pour l'Angleterre. Cailliaud prend le temps de dessiner les temples de Naga et de Messourat, y signant son passage par un graffiti (retrouvé par l ethnobotaniste Michel Chauvet en 1980). Plus loin, dans la boucle du Nil, il fera encore, pour son atlas, 26 dessins des ruines pyramidales de la butte-témoin gréseuse du Djebel Barka ! .Il n'hésite pas à faire un détour de 200 kilomètres dans le désert (à l'ouest de la deuxième cataracte) pour visiter l'oasis de Selimeh (Selima). Avant Assouan, il visite Abou-Simbel. Au retour de ce périple de trois ans, Cailliaud a la conviction que la religion des Egyptiens dont les dieux sont identifiés à des animaux, a été fortement influencée par l'Ethiopie qui possède une faune et une flore très riches. A Thèbes, il complète sa collection de dessins des arts et métiers. Son témoignage est essentiel car depuis cette expédition, certaines tombes ont été perdues et beaucoup de fresques ont été altérées par l'affluence des touristes. De même à Abydos, il prend soin de reproduire un important bas-relief portant les noms des rois d'Egypte inscrits dans leur cartouche. Ce relevé permettra à J.F. Champollion d'établir la généalogie des pharaons de la XVIIIème dynastie. Le 30 octobre 1822, Cailliaud et Letorzec embarquent avec leurs collections pour débarquer, le 11 décembre, à Marseille. A Paris, Jomard découvre enfin l'impressionnante collection d'antiquités rapportées: 950 pièces dont dix momies humaines ainsi que des momies de chiens, chats, crocodiles, poissons, des objets funéraires, des statues en bois, granite, bronze, ivoire, des bijoux: colliers, bracelets, scarabées, des sarcophages parfois richement décorés, tel celui de Pétéménon, renfermant la momie du défunt, sans oublier les armes, insectes, coquillages, oiseaux empaillés et plantes qui seront étudiées par Raffeneau-Delile (1826). S'y ajoutent les descriptions de régions traversées, des habitants, de leurs us et coutumes, la fameuse collection des Arts et Métiers, les relevés et cartes géographiques ... De retour à Nantes, le 24 février 1823, Cailliaud est accueilli en héros local. Son « Voyage à Méroé et au Fleuve Blanc » en quatre volumes et deux atlas paraît de 1823 et 1827, avec le concours de Jomard pour les deux atlas totalisant 150 planches et cartes établies d'après les observations astronomiques de Letorzec. Sur proposition de F. de Chateaubriand, ministre des Affaires étrangères, il est fait chevalier de la Légion d'honneur. Cailliaud accède au poste de Conservateur du Muséum d'histoire naturelle de Nantes en 1836. Outre le récit de son voyage, louvrage contient des descriptions géographiques précises, le résultat des observations astronomiques et météorologiques (nombreux tableaux dans le volume IV), des vocabulaires de la langue de Syouah », « de la langue des nègres Qamâmyl à Bertât » et de « langue parlé à Dongolah", la liste de villages oasis de basse Egypte et du nord du Soudan, transcriptions d'épigraphes grecques trouvées à Thèbes, des remarques sur les moeurs et les usages ainsi que des observations sur la faune et la flore. Les deux atlas totalisent 149 planches et cartes remarquablement exécutées. La plupart sont lithographiées daprès les dessins de lauteur. Elles figurent des monuments, des paysages, plans, vues, inscriptions, costumes, faune, flore... Provenance : exemplaire offert par lauteur « à Mme Libaudière » (inscription à lencre noire sur le faux-titre du vol. 1). Nous navons pas localisé dautre exemplaire dans son état dorigine, à toutes marges, conservé dans ses cartonnages éditeurs. Cette condition des planches, non reliées, présente un grand intérêt dans le cadre dune exposition.